Les lacs du Mt. Fuji (富士五湖)

Pour nos derniers jours à Tokyo, ma petite cousine Elisa (qui étudiera à Ginette l’année prochaine parce qu’elle est trop forte (⋈・◡・)✰) et moi avons décidé de faire le tour des lacs du mont Fuji en vélo avant de rentrer en France ! Nous avions pensé à faire l’ascension, mais comme ça nécessitait un peu d’équipement et de préparation, on a décidé de reporter ce challenge à la prochaine fois qu’on sera tous réunis à Tokyo, avec je l’espère Emma qui sera aussi de la partie !
Réveil aux aurores le dimanche du 12 juillet afin d’attraper le métro de 7h09 pour prendre le bus à Shinjuku et arriver au premier lac avant 10h00, de quoi nous laisser le temps de louer les vélos, de faire le tour d’au moins quatre lacs sur cinq (soit une petite centaine de kilomètres prévus en six heures), et d’être rentrés juste à temps pour le dîner ! Enfin, ça c’était le plan, mais évidemment, tout ne s’est pas passé exactement comme prévu…
Les ennuis commencent dès l’autoroute, où nous sommes coincés dans les bouchons pendant une heure (avec une forte odeur de pieds dans l’autobus durant une partie du trajet…). Après un passage obligé au konbini pour acheter les onigiris du déjeuner, nous arrivons au magasin de vélos aux alentours de 10h30. Le loueur, au demeurant fort aimable, disparaît quelques secondes dans son arrière-boutique et revient avec des bicyclettes bleues pour Elisa et moi, et une jolie bicyclette rose pour Thomas. Un petit réglage de la hauteur des selles, et nous voilà fin prêts à partir ! Sans plus attendre, nous nous élançons sur nos vaillantes montures… avant de nous arrêter un ou deux kilomètres plus loin en nous apercevant que Thomas avait disparu. Après plusieurs minutes d’attente, Elisa et moi commençons à nous inquiéter, lorsqu’un vacarme assourdissant parvient soudain à nos oreilles: c’est Thomas qui surgit à l’horizon, à une vitesse avoisinant les 2 km/h, sur une bicyclette couinant plus qu’un cochon qu’on égorge. Nous suggérons de retourner au magasin pendant qu’on est pas trop loin, mais Thomas nous assure qu’il a réglé le problème, donc nous voilà repartis pour de bon… Enfin, presque. Quelques minutes plus tard, le bruit insupportable se fait de nouveau entendre, et la roue arrière du vélo rose refuse de tourner. Nous devons donc nous arrêter et téléphoner au loueur, qui a heureusement la gentillesse de nous amener une bicyclette de rechange.
Notre projet de faire le tour des 5 lacs se trouve donc légèrement compromis, puisqu’il est 13h00 et nous en sommes toujours au premier.  Nous décidons donc de nous arrêter déjeuner au second lac, puis de rebrousser chemin tranquillement pour ne pas louper le bus du retour. Le soleil brille dans le ciel sans nuages, et la chaleur étouffante s’oublie en pédalant. Tout semble absolument parfait… Enfin, presque. Une fois arrivés à l’extrémité du premier lac, nous nous retrouvons en face d’une gigantesque montée dont nous ne voyons même pas la fin. Pas le choix, nous commençons l’ascension, et tandis qu’Elisa et moi descendons de selle à mi-chemin, Thomas réussit l’exploit de pédaler jusqu’en haut… avant de s’écrouler par terre d’épuisement (et sans doute de déshydratation). Heureusement, après quelques minutes d’agonie et de nombreuses gorgées d’eau, il se remet péniblement en selle, et nous revoilà repartis en direction du second lac, auquel nous nous arrêtons pour un pique-nique bien mérité. Nous trouvons le parfait endroit pour nous poser, au bord de l’eau, avec devant nous une montagne ressemblant étrangement au mont Fuji (mais dans le doute nous dirons simplement une montagne majestueuse).
Elisa et moi enlevons nos chaussures pour tremper nos pieds dans l’eau, pendant que Thomas s’approche déjà du lac… et tombe dedans. Si notre expédition était adaptée en bande dessinée, Thomas serait probablement le personnage avec toujours un nuage pluvieux sur la tête… Finalement, nous piquons tous une tête dans le lac avant de savourer nos onigiris au soleil, dans un cadre paradisiaque… (◡‿◡✿)

Le ventre repu et les vêtements (presque) secs, nous prenons le chemin du retour et arrivons à la gare avec une bonne marge d’avance sur le bus. Notre expédition, qui avait si mal commencé, se termine finalement sans embûches… Enfin, presque. Après être restés coincés deux heures dans les embouteillages (avec en prime, pour Thomas, l’odeur nauséabonde des pieds de son voisin), nous atteignons Shinjuku à 22 heures passées, complètement épuisés, mais assez fiers d’être venus à bout de cet épique périple.
C’était notre première aventure entre cousins, et sûrement pas la dernière ! ⁽(◍˃̵͈̑ᴗ˂̵͈̑)

En haut du Mont Takamizu

Mt. Sogakusan 惣岳山Takamizusan Hiking Trail: 10.5 km – 3 sommets
Mt. Takamizusan 高水山 (759 m)
Mt. Iwatakeishiyama 岩茸石山 (793 m)
Mt. Sogakusan 惣岳山 (756 m)

Cette année, la saison des pluies est étonnamment ensoleillée, si bien que certains s’inquiètent déjà de manquer d’eau cet été… mais pour moi qui avait peur de passer mes dernières semaines au Japon sous la pluie, c’est plutôt un coup de chance ! J’ai donc pu reprendre mes traditionnelles randonnées du dimanche, par un temps absolument radieux, idéal pour célébrer mon admission à l’EM Grenoble en prenant un grand bol d’air frais ! J’ai choisi d’épargner mes articulations en faisant une randonnée relativement longue mais de difficulté modérée, s’étendant sur trois sommets d’assez basse altitude. Une fois n’est pas coutume, j’ai presque respecté les indications de temps en la finissant en un peu moins de 4h au lieu de 4h30 ! Mais même en prenant vraiment mon temps en chemin, j’avais l’air de sortir de la douche comparée aux Japonais qui ne transpirent jamais, malgré leur quadruple couche de vêtements, leurs collants sur les jambes et les bras, leur chapeau et/ou visière sur la tête, et leur sac à dos dépassant le format cabine ! Je me demande vraiment s’il existe une explication physiologique à ce phénomène, car soit les Japonais sont les seuls mammifères terrestres dépourvus de glandes sudoripares, soit cela relève d’une cause plus grande qui dépasse l’entendement humain… Bref, ce fut une randonnée très paisible et relaxante, exactement ce dont j’avais besoin pour décompresser de l’attente interminable des résultats, et que j’ai fini de la meilleure manière qui soit en savourant mes onigiris de la victoire sur les rives de la rivière traversant la vallée de Mitake, les pieds dans l’eau et le sourire aux lèvres ! ( ・ᴗ・̥̥̥ )

Toutes les photos de ma randonnée ici !

Le train au Japon

Lorsque je prenais le train ou le métro en France, j’emportais toujours de quoi m’occuper. Peu importait la longueur du trajet, même entre trois stations de métro, j’avais le temps de sortir mon baladeur et d’écouter une chanson. Pas spécialement pour m’occuper ou me distraire, mais plutôt pour « rentabiliser » mon temps, car entre jouer sur mon portable et ne rien faire, je préfèrerais encore mille fois ne rien faire. Mais ici, je ne me rappelle pas m’être déjà ennuyée une seule fois dans le train. Même lorsque je suis allée à Nokogiriyama, à presque trois heures de chez moi, j’ai regretté d’avoir alourdi mon sac avec un bouquin, car après l’avoir sorti et lu quelques pages, je l’ai immédiatement reposé pour vaquer à mon « occupation » habituelle, c’est-à-dire… ne rien faire. Sans que je ne sache pourquoi, les trajets en train au Japon me semblent passer beaucoup plus vite qu’en France, et ne sont surtout jamais, jamais ennuyeux. Je dirais même, presque sans exagération, que chaque trajet est pour moi un spectacle, qui commence avant même d’entrer dans la rame. Beaucoup de choses vont me manquer à propos des trains japonais, mais si je devais n’en retenir que quelques unes ce serait celles-ci:

  • Le savoir-vivre

Lorsque j’étais en France il y a deux semaines, j’ai remarqué qu’il y avait désormais des flèches tracées sur les quais du métro parisien, mais je me suis demandée un moment si c’était mon imagination car personne d’autre ne semblait les voir: comme d’habitude, les gens se précipitaient pour rentrer les premiers dans la rame, ne laissant personne en sortir et bousculant si besoin ceux qui avaient le culot d’essayer… Je ne peux m’empêcher à chaque fois de penser que si le déluge venait à se produire, Noé aurait sans doute honte en voyant les animaux monter dans son arche de manière plus civilisée que ses congénères. Ici, comme vous l’aurez deviné, c’est tout l’inverse: les gens font la queue en ligne bien droite derrière les marques indiquant l’emplacement des portes à l’arrêt du train, et lorsque ce dernier arrive, les gens attendent que le dernier passager soit sorti avant de monter à leur tour. Et une fois dans la rame, on se fait le plus petit possible, d’abord en termes de place, mais aussi et surtout en faisant preuve de discrétion. Observer les Japonais dans le train aura fait partie de mes passe-temps favoris cette année, et c’est d’ailleurs la première image qui m’est venue à l’esprit quand l’un des jurés de l’EDHEC m’a demandé « qu’est-ce qui vous amuse ? ». Ce qui peut sembler paradoxal puisque la liste des occupations des Japonais dans le train est, pour ainsi dire, assez limitée: il y a ceux qui dorment (et se réveillent toujours à point pour leur arrêt, l’un des mystères que je n’ai pu encore percer…), ceux qui ont les yeux rivés sur leur smartphone (à stalker leurs connaissances sur les réseaux sociaux ou jouer à des jeux très intelligents), celles qui se remaquillent (ou contemplent simplement leur reflet au travers de leurs lentilles d’alien) ou encore, pour finir, les fameux salaryman qui rentrent du boulot un peu éméchés. Mais même lorsque ces derniers sont ivres morts, le seul dérangement qu’ils pourraient vous causer est de parler un peu fort. Car en plus d’être discrets, polis et disciplinés, les Japonais ne plaisantent pas avec les bonnes manières: j’aurai appris plus en prenant le train à Tokyo qu’avec tous mes cours d’éducation civique au collège ! Et surtout de manière beaucoup plus ludique, comme le montrent ces posters qu’on peut voir accrochés dans les trains et qui sont, disons, assez explicites…

Mais ce qui va me manquer le plus à propos des trains japonais, et qui les différencient radicalement de leurs homologues français, est la sécurité. Il m’est déjà arrivé de rentrer chez moi par le dernier train, et même à une heure du matin, entourée de gens ayant un peu forcé sur le saké, dans la plus grande gare du monde qu’est Shinjuku, je ne me suis jamais sentie en insécurité. Rien que d’imaginer la même situation à la gare du Nord me donne la chair de poule, et pour être honnête, même dans le TER vers Chantilly en plein après-midi, je n’étais pas totalement rassurée…

  • L’ingéniosité

L’autre chose qui m’a frappée quand j’ai pris le train au Japon pour la première fois est l’ingéniosité avec laquelle tout est conçu pour optimiser au maximum le trafic. Tout d’abord, les portillons automatiques. En France, nous avons soit les tourniquets massifs sur lesquels certains s’entraînent au saut en hauteur, soit les portes qui s’ouvrent et se referment telles une mâchoire maléfique prête à vous tronçonner en deux… Au Japon, il y a aussi des barrières, mais celles-ci se refermeront sur vous uniquement si vous essayez de frauder ! Résultat, le trafic est beaucoup plus fluide puisqu’il suffit de passer sa carte de transport sur le lecteur tout en franchissant le portillon, sans avoir nullement besoin de s’arrêter de marcher. Quasiment tout le monde a une carte qu’il faut charger régulièrement et qu’on peut même utiliser pour payer de petits achats dans les konbinis ou les distributeurs de boissons (自動販売機). A notre passage, le portillon affiche le montant restant sur notre carte, et si ce dernier est insuffisant, il y a toujours une « fare adjustment machine » à côté pour la recharger. Et même pour les rares personnes préférant encore le papier, j’ai l’impression que les tickets mettent moins de temps à ressortir ici…
Deuxièmement, l’ingéniosité dans la conception des trains eux-mêmes, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur. Pas une seule fois je n’ai pris le métro à Paris sans me dire qu’il était terriblement agencé, et réfléchir à différentes manières de mieux optimiser l’espace. Stupeur quand je suis arrivée à Tokyo: les trains étaient agencés exactement comme je l’avais imaginé, avec pour résultat l’impression d’avoir beaucoup plus de place, dans des rames qui ne sont pourtant guère plus larges qu’en France, voire même plus petites. Des banquettes alignées le long des fenêtres, un couloir central dégagé avec suffisamment de poignées pour s’accrocher, et des portes-bagages que les gens utilisent sans craindre de voir leurs effets personnels disparaître la seconde d’après: simple, logique et efficace.

A l’extérieur aussi, l’ingéniosité japonaise saute immédiatement aux yeux: les bullet trains ont un profil si aérodynamique qu’on pourrait presque croire qu’un coup de vent les ferait avancer. A l’inverse, les trains « normaux » (comme celui que j’emprunte pour aller au centre-ville qui ressemble à ça) paraissent tout droit sortis des années 80 avec leur forme carrée et leur look vintage, mais sont pourtant incroyablement silencieux, et je peux vous dire qu’on s’y sent beaucoup mieux que dans le plus récent des RER parisiens…

  • La précision

L’agencement ne fait pas tout, ce qui rend les trajets en train au Japon si agréables, c’est surtout leur précision. Avec 3.6 million d’usagers quotidiens et 5 heures de pointe (dont la première commence à 4h30 du matin), la gare de Shinjuku est la première au monde en termes de trafic et ne peut donc se permettre aucun retard, fût-il d’une minute, car cela perturberait le déroulement de la journée entière. Et cela fait toute la différence, car non seulement cela vous permet de planifier votre itinéraire à la minute près (ici on peut dire « on se retrouve à 18h56 » sans passer pour un maniaque obsessionnel de la trotteuse), mais aussi car cela rend presque supportable de se retrouver entassé comme des sardines durant l’heure de pointe puisque vous savez exactement dans combien de minutes vous pourrez à nouveau respirer.
La précision des trains au Japon est si parfaite qu’elle semble être le fait d’une intelligence supérieure ou divine, mais elle n’existe que grâce à l’extrême méticulosité des employés, reconnaissables pour la plupart à leurs gants blancs… mais aussi à leur voix ! Les conducteurs utilisent en effet une voix nasale pour annoncer les arrêts (d’après cette vidéo, on l’entendrait plus distinctement), ce qui surprend beaucoup au début mais, en fin de compte, se marie assez bien avec les petites mélodies spécifiques à chaque station (par exemple, pour la ligne Yamanote). En plus d’être affiché sur les écrans de la rame, chaque arrêt est donc annoncé par trois voix différentes: celle, nasale, du conducteur; celle automatique et sérieuse du train; et enfin celle automatique et hilarante de la station (« Kichijoooooji, Kichijoooooji ! »). Je ne m’étais pas trompée, le japonais est en effet une lanque musicale et toute en nuances…

  • La propreté

Dernière chose qui rend les trajets en train si agréables: la propreté. La première fois que je suis venue au Japon, mon oncle est venu me chercher à l’aéroport et lorsqu’on est montés dans le train, il m’a dit une phrase que je n’oublierai jamais: « c’est tellement propre qu’on pourrait manger par terre ». Si cette phrase m’a autant marquée, c’est tout simplement parce qu’elle est vraie: pas un seul mégot ni chewing-gum sur le sol, pas de papiers qui traînent, pas de sièges déchirés ou de strapontins cassés, pas de vitres rayées, pas de wagons vandalisés, pas d’odeurs désagréables même lorsque la température dehors dépasse les 30°C… Les trains brillent comme des sous neufs et leur intérieur est impeccable grâce, encore une fois, à l’incroyable minutie et la discipline quasi-militaire des employés de gare japonais, comme le montre la vidéo ci-dessous.

C’est peut-être tout cela qui fait que je ne vois pas le temps passer quand je prends le train au Japon, et qui fait de chaque trajet un moment de réelle détente, passé à regarder les passagers autour de moi ou simplement les paysages défiler à la fenêtre.
Est-il possible de se réhabituer au train, métro et RER français après avoir connu ça ? Je me pose aussi la question…

En haut du Mt. Ougiyama (扇山)

La saison des pluies ne va pas tarder à commencer, et avec mon retour en France éclair-ultra-intensif la semaine prochaine, il est possible que ma randonnée d’hier fusse la dernière avant un bon moment. Pas question donc d’escalader une colline, et les 28°C affichés par le thermomètre sont une raison de plus de grimper en altitude pour avoir un peu de fraîcheur ! Sur les conseils d’une amie l’ayant fait la semaine passée, je décidai d’emprunter le circuit reliant le Mt. Ougiyama (扇山) au Mt. Momokurayama (百蔵山), censé offrir de superbes vues du Mont Fuji. Lorsque j’arrivai au sommet du premier après une assez rude ascension de 1138 mètres tout de même, Fuji-san était malheureusement caché derrière les nuages et n’a pas non plus daigné se montrer lorsque j’atteignis le deuxième sommet. Je fus bien sûr un peu déçue, mais c’est aussi cela qui fait la « magie » de la randonnée: marcher pendant des heures, repousser les limites de son corps dans les passages les plus abruptes, martyriser ses jambes et ses articulations dans les descentes les plus raides, cette sensation de vertige qui s’empare de nous lorsqu’on se trouve littéralement au pied du mur, devant un nombre incalculable de marches à monter, la sueur qui coule dans les yeux et les vêtements qui collent à la peau… Tout cela sans la moindre certitude sur ce qui nous attend au sommet. Mais pendant que je savourais chaque bouchée de mes onigiris de la victoire, assise sur l’herbe devant les montagnes aux cimes embrumées, je me dis que la récompense n’était décidément pas toujours ce qu’on croit: même si cela en fait partie, ce n’est pas ni la vue du sommet qu’on prend en photo pour la poster ensuite sur Facebook, ni le nombre de kilomètres parcourus et de calories brûlées affichées sur notre smartphone. La récompense, c’est la saveur redécouverte de chaque gorgée d’eau bue en chemin, le goût de chaque grain de riz avalé au sommet ; c’est enfin s’asseoir, avec la peur de ne plus jamais se relever tellement nos jambes sont endolories ; c’est l’excitation grandissante sur le chemin du retour en pensant à la bonne douche qui nous attend ; ce sont les légères courbatures au réveil après avoir dormi toute la nuit comme un loir… Ma récompense ce jour-là, ce fut d’arriver en haut du Mt. Ougiyama en ressemblant à ça, regarder les nuages cachant le Mont Fuji, et me dire que si c’était à refaire, je le referais sans la moindre hésitation.
Il n’y a de maigre récompense que pour de maigres efforts, puisque la récompense ne se trouve pas à l’arrivée mais bien déjà en nous, et elle le reste aussi longtemps qu’on se souvient du chemin parcouru pour aller la chercher.
Je n’aurai certes pas vu Fuji-san, mais il m’a semblé en redescendant vers la gare que la forêt n’avait jamais été plus belle, et le chant des oiseaux plus joyeux que ce jour-là.
Que les jurés soient prévenus, j’arrive aux oraux le corps et l’esprit plus sains que jamais, et les poumons gonflés à bloc d’air montagnard pour livrer les plus beaux discours !

Autour du Lac Okutama (奥多摩湖)

Dimanche dernier, privilégiant cette fois-ci la distance à l’altitude, j’ai choisi de marcher jusqu’au lac Okutama depuis la gare de Kori en empruntant deux chemins de randonnée: le premier (Okutama Walking Trail) reliant la gare de Kori à celle d’Okutama; le deuxième (Okutama Mukashi-michi, litt. « route d’autrefois ») menant jusqu’au lac. Au total, une bonne quinzaine de kilomètres que j’effectuai en 4h30 au lieu des 6 estimées, non pas pour contredire une fois de plus Google Maps (quoique) mais simplement par peur de louper le bus qui me ramena à la gare… et circulait en fait jusqu’à la tombée de la nuit. Malgré quelques tronçons sur la route, ce fut une longue et reposante balade le long de la rivière Tama, avec le clapotis de l’eau en fond sonore et le vert rassérénant des montagnes devant les yeux. Il me reste encore tant d’endroits fantastiques à explorer autour de Tokyo; et je n’ose imaginer les merveilles que réservent les autres régions et qu’il faudrait définitivement plus d’une vie pour découvrir. Ce n’est plus qu’une affaire de semaines avant que je sache où je vivrai l’année prochaine, mais chaque jour qui s’écoule ne fait que me conforter dans la certitude que je reviendrai vivre un jour ici, et j’espère cette fois-ci pour bien plus qu’une année… (๑◔‿◔๑) ⁎⁺˳✧༚

— De Kori Station au Lac Okutama: mon itinéraire en images

Admissible partout ! ٩(^ᴗ^)۶

Les résultats des concours que j’ai passé en avril dernier sont enfin tous tombés: je suis admissible à toutes les écoles, sans exception ! Et surtout aux trois qui m’intéressent tout particulièrement: l’EM Grenoble, l’ESC Rennes & KEDGE (Bordeaux-Marseille) ! Pour les deux premières, je ne me suis toujours pas remise de mes notes et de mon classement général: 74ème et 68ème sur plus de 3500 candidats ! C’est certes un grand pas en avant, mais il s’agit désormais de faire aussi bien aux oraux qui auront lieu durant la première quinzaine du mois de juin… en France. Exact, il va me falloir revenir encore une fois pour défendre mon beefsteak, ce qui représente évidemment un énorme coût financier, mais à quoi sert de mettre régulièrement de l’argent de côté si ce n’est pour faire face à ce genre d' »investissements » sur l’avenir ? Dès l’annonce des premiers résultats, j’ai commencé sans tarder à me préparer intensivement pour l’oral d’espagnol (en d’autres termes, j’ai deux semaines devant moi pour ré-apprendre une langue que je n’ai pas pratiqué depuis le lycée et que j’ai donc complètement oublié…), ainsi bien sûr que pour les entretiens. A l’heure actuelle, je n’ai toujours aucune idée d’où je serai l’année prochaine après le Havre et Tokyo, mais les possibilités viennent de se réduire à Paris, Grenoble, Rennes ou Bordeaux, et j’espère Lille si les résultats d’admissibilité de l’EDHEC le 3 juin sont positifs ! Les semaines à venir promettent donc d’être intenses et riches en émotions, mais heureusement qu’il me reste encore des centaines de montagnes à escalader le dimanche ! :-)

En haut du Mont Ōyama (大山)

Le mont Ōyama (大山), situé dans la préfecture de Kanagawa, est considéré comme sacré et accueille chaque année de nombreux pèlerinages depuis le 18ème siècle. Aussi nommé mont Afuri (雨降り山 ) en référence à la grande quantité de pluie et de nuages associés à la montagne, on y prie la divinité de la pluie au sanctuaire principal Ōyama-Afuri-jinja situé au sommet, à 1.252 mètres d’altitude.

Lors de ma randonnée au mont Jinba, j’ai rencontré deux Japonaises qui, en plus d’être de grandes adoratrices de la France (au point d’immortaliser notre rencontre par une petite dizaine de photos), connaissaient assez bien les montagnes aux alentours de Tokyo et m’ont recommandé le mont Ōyama pour ma prochaine excursion. C’est donc ce que je fis hier, pensant qu’il s’agirait d’une petite promenade de santé après le mont Nokogiri et ses milliers de marches. Et bien que nenni ! Ce fut sans exagération la plus dure randonnée de toute mon existence. Tout d’abord, parce que le bien-nommé mont Ōyama (littéralement « grande montagne ») culmine tout de même à 1252 mètres; mais aussi et surtout parce que l’ascension est extrêmement raide…
En arrivant à la gare d’Isehara, il faut prendre un bus pendant une vingtaine de minutes, qui nous dépose au début d’une rue bordées de magasins de souvenirs et de restaurants spécialisés en tofu, préparé avec l’eau d’Ōyama. A la fin de celle-ci, les choses sérieuses commencent: on a le choix entre prendre le funiculaire pour gagner quelques centaines de mètres d’altitude; ou bien emprunter soit le « chemin des femmes » (女坂, onna-zaka) soit le « chemin des hommes » (男坂, otoko-zaka). Bien évidemment, je n’ai pas pris le funiculaire (est-ce encore la peine de le préciser ?) et, ne voyant aucun randonneur s’aventurer sur l’autre, m’engageai sur le chemin des femmes aux alentours de 10 heures. Après une demi-heure de marche, j’atteins le temple Shimosha, point d’arrivée du funiculaire… et début de la « vraie » ascension. Temps de trajet estimé: 90 minutes.
J’arrive au sommet après avoir monté à peu près 3000 marches et perdu la moitié de ma masse corporelle en transpiration, au bout de l’heure la plus éprouvante, verticale et déshydratante de mon existence. Comme il n’était que 11h30, j’ai décidé de garder mes « onigiri de la victoire » pour un peu plus tard et, après quelques instants de contemplation (et de récupération) au sommet, j’entamai toute fringuante la descente ! Mes articulations en prirent à nouveau un sacré coup, en particulier avec les marches du « chemin des hommes » que je décidai d’emprunter au retour, mais je fus heureusement abritée de la chaleur et du soleil durant tout le chemin. J’arrivai en bas aux alentours de deux heures, avec les jambes en compote et la drôle d’impression d’avoir des marches sous les pieds… Reprendre le bus jusqu’à la gare pour vite rentrer m’étaler sur mon lit ? Que nenni ! Comme il était encore tôt, je me suis dit « pourquoi ne pas profiter encore un peu de ce temps magnifique en regagnant la gare à pied ? » . Je demandai donc le chemin à un policier, qui écarquilla les yeux comme si je lui avais demandé la direction du Pérou, avant de me dire que la gare se trouvait à une bonne heure de marche d’ici. Je me mis donc en route, et je dois avouer que ce fut peut-être mon moment préféré de la randonnée: je n’ai eu qu’à aller toujours tout droit jusqu’à la gare, le long d’une même route traversant le village d’Ōyama, pouvant ainsi observer l’architecture si particulière des maisons japonaises, croiser certains habitants en train de travailler courageusement dans les plantations ou bien des écoliers rentrant joyeusement de l’école, chapeau sur la tête et cartable arrondi sur le dos… Durant tout le trajet, je n’avais qu’un seul mot à l’esprit, celui de sérénité. Je dégustai mes deux onigiris sur le chemin, les jambes lourdes de fatigue mais le coeur plus léger que jamais.
Ci-dessous, une carte d’Ōyama avec mon itinéraire tracé en orange, et une petite vidéo rassemblant mes photos prises ce jour-là :)

En haut du Mont Nokogiri (鋸山)

Situé dans la préfecture de Chiba, le mont Nokogiri (lit. « montagne-scie ») accueille le temple de Nihon-ji, célèbre pour ses 1500 statues d’arhat et son Daibutsu, le plus grand Bouddha de pierre du Japon.

« Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt »: un proverbe qu’ont toujours illustré mes parents et auquel je crois bien n’avoir jamais autant adhéré qu’aujourd’hui, après un nouveau dimanche passé à gravir des sommets et jouir des merveilles que nous offre la Nature. L’ascension du week-end est bien en passe de devenir une tradition, à laquelle même la saison des pluies ne parviendra peut-être pas à me faire renoncer !
Réveil programmé à 5h58 donc, pour avoir le temps d’avaler un bon petit-déjeuner avant de prendre le train à 7 heures en direction du Mont Nokogiri, situé à trois heures et quelques de chez moi. Arrivée là-bas aux alentours de 10 heures, j’ai le choix entre escalader à pied les 329 mètres de dénivelé, ou bien emprunter le téléphérique qui me déposera comme une fleur au sommet. Bien entendu, j’optai pour la première solution, et sans plus tarder entamai la rude ascension qui devait me mener aux portes du temple Nihon-ji. Et croyez-moi que quand je dis rude, je pèse mes mots: parmi toutes les randonnées que j’ai pu faire (et Dieu sait si certaines furent ardues —ma soeur en est restée traumatisée), ce fut certainement la plus éprouvante, non pas en raison de la hauteur du sommet (qui n’était « que » de 329 mètres), mais plutôt à cause du nombre incalculable de marches que j’ai dû monter, non seulement pour arriver jusqu’à celui-ci, mais également à l’intérieur même du temple.
Car, en effet, si le site ne compte déjà pas moins de 2640 marches au total, on est en plus obligé de descendre et remonter à certains endroits pour tout voir, comme le montre ce plan.
Alors, est-ce que tout ceci en valait vraiment la peine?
Pour moi, la réponse est oui.
Il y a une myriade d’endroits offrant des panoramas époustouflants, mais plus rares sont ceux qui conjuguent la beauté naturelle, brute, avec la beauté, peut-être moins grandiose mais tout aussi sublime, des choses créées par l’Homme. Le silence qui règne au sein du temple, le souffle du vent entre les feuilles des arbres, le chant des oiseaux dans la forêt ou bien le léger clapotis des vagues au bord de mer ont tous le pouvoir de nous apaiser; et l’on se sent empreint d’une sérénité similaire, et pourtant différente, au sommet de la montagne ou au pied du Bouddha géant.
Je fus autant touchée par la perfection des paysages et les milles nuances de vert rehaussées par le bleu du ciel, que par l’imperfection des statues et les milles expressions pouvant se lire sur les traits de leur visage de pierre.
Avant de repartir, je m’attardai un moment sur la plage afin de respirer à pleins poumons l’air marin pour la première fois depuis mon arrivée au Japon. La nuit commençait déjà à tomber lorsque je montai dans le train aux alentours de cinq heures, et je passai ainsi le trajet du retour à admirer les paysages de campagne défilant sous mes yeux, envahie par une sensation de bien-être que seule la fatigue physique après de durs efforts récompensés peut procurer.
Parce que les images parlent toujours plus que les mots, voici donc quelques photos sélectionnées parmi la bonne centaine que j’ai prises ce jour-là  (๑◔‿◔๑) ⁎⁺˳✧༚
Et bien sûr, le traditionnel montage vidéo !

Kurayami Matsuri (くらやみ祭)

Le Kurayami Matsuri (Darkness Festival) à Fuchū, le 5 Mai 2015.

Mardi dernier, ma voisine italienne Rachele m’a proposé d’aller à Fuchū pour le Kurayami Matsuri (Festival des Ténèbres), au temple Ohkunitama, l’un des plus anciens de la capitale. C’était la première fois que j’assistais à un festival traditionnel, avec le défilement des immenses tambours et des mikoshi (sanctuaires portatifs), au milieu d’une foule dense et compacte, éclairée par des centaines de lanternes. Arrivées un peu en avance, nous avons pu être aux premières loges pour profiter du spectacle; mais au bout d’environ une heure, voyant que les derniers mikoshi ne se pressaient pas pour arriver, nous avons décidé de s’extirper de la foule pour profiter d’une autre caractéristique des festivals au Japon toute aussi importante, à savoir une incroyable abondance de nourriture étalée devant nos yeux dans un dédale de stands servant des mets plus alléchants les uns que les autres, et entre lesquels on se plaît à déambuler, guidés par les délicieuses effluves, comme dans un labyrinthe édénique dont on ne voudrait jamais sortir…

En haut du Mont Jinba 陣馬

Départ: Takao-san (599m) Arrivée: Jinba-san (857m) 18,5 kilomètres

Trois heures pour parcourir les 18,5 kilomètres reliant Takao-san (599m) à Jinba-san (857m)

Les Japonais sont connus pour avoir très peu de vacances et , malheureusement pour eux,ceci est loin d’être une légende. La Golden Week est donc le grand évènement dans l’année, beaucoup en profitant pour partir à l’étranger, visiter le Japon ou bien retourner dans leur famille. Pour ma part, j’ai décidé d’en profiter avant que la saison des pluies (梅雨, tsuyu) ne débute en allant prendre un grand bol d’air frais à la montagne!

A Takao-san (高尾山), plus précisément, où j’étais déjà allée au moment des momiji, les fameux érables rouges. Mais cette fois-ci, je ne me suis pas arrêtée au sommet de Takao et ai décidé d’emprunter le Takao-Jinba Trail, soit la plus longue randonnée possible pour laquelle il était conseillé de prévoir au minimum 5h30. Je ne sais pas si ce sont les temps de trajet conseillés qui sont légèrement surestimés, ou bien moi qui marche à un rythme d’hystérique (sans doute un peu les deux), mais j’arrivai au sommet de Takao-san en seulement une demi-heure au lieu des 90 minutes recommandées, et mis environ trois heures pour atteindre le mont Jinba. Le chemin fut beaucoup moins ardu que je m’y attendais et les panoramas tout au long de ce dernier furent d’une beauté à couper le souffle. La météo était idéale: ciel bleu, grand soleil et une chaleur encore supportable. Et rien de mieux pour clore cette randonnée parfaite que de savourer mes deux onigiris au saumon tranquillement assise sur l’herbe, perchée à 857 mètres d’altitude, avec devant mes yeux l’un des plus beaux paysages qu’il m’a été donné de voir dans ma vie.
Nous n’avons beau n’être que de passage sur cette Terre, mais c’est lors de journées comme celle-ci qu’on réalise que la durée de ce passage n’est pas une donnée absolue, et qu’il ne tient qu’à nous de transformer cette brièveté en intensité, en vivant chaque jour comme s’il devait se répéter à l’infini sans qu’on n’y veuille changer la moindre seconde.